Psychogénéalogie: quand la mémoire familiale empêche d'avancer
En vogue ces dernières années, l'analyse transgénérationnelle s'appuie sur l'étude de l'arbre généalogique de l'individu pour mieux expliquer et apaiser ses angoisses. Décryptage.
L'analyse transgénérationnelle veut que les traumatismes et non-dits vécus par les ancêtres d'un individu se répercutent sur ce dernier jusqu'à induire inconsciemment des troubles.
A la naissance de sa fille, Julia ressent le besoin impérieux de dénouer son passé. "Dans mon couple, c'était une période compliquée financièrement. J'avais l'impression de tout porter, en plus de ma fille dont je venais d'accoucher. Je me sentais angoissée, j'avais besoin d'en parler", se souvient la quadra parisienne. "Par hasard, une de mes amies elle aussi en plein questionnement existentiel à l'époque m'a parlé de l'analyse transgénérationnelle et des résultats spectaculaires prêtés à cette approche." Pendant trois ans, à raison d'une séance tous les quinze jours, Julia se rend donc chez sa thérapeute. "Lors de la première rencontre, je lui ai exposé mon mal-être. On a tout de suite commencé à construire mon arbre", raconte-elle.
L'arbre généalogique comme outil d'analyse
Fondée sur l'étude du génosociogramme, sorte d'arbre généalogique qui permet de schématiser l'histoire et les liens familiaux, l'analyse transgénérationnelle veut que les traumatismes et non-dits vécus par les ancêtres d'un individu se répercutent sur ce dernier jusqu'à induire inconsciemment des troubles, qu'ils soient de nature psychologique ou physique. Une approche pratiquée depuis plusieurs années par Christine Ulivucci, psychothérapeute de formation et auteure de Ces photos qui nous parlent (ed. Payot). "Dans le jargon, ces symptômes font partie de ce que l'on appelle le fantôme transgénérationnel", explique-t-elle.
Pour en prendre conscience, le patient dessine son arbre face au thérapeute qui va être attentif à chaque signe: un lapsus, un oubli, un espacement tantôt grand tantôt petit sur une même branche... "L'arbre agit en quelque sorte comme une interface de révélation. Il permet à la personne de symboliser et de mettre à distance les relations et événements familiaux", explique la professionnelle.
Pour Julia, l'analyse s'est avérée laborieuse: "J'ai perdu mon arbre deux fois. La première fois, je me suis inscrite tout en bas de la lignée. J'étais remontée jusqu'aux arrières grands-parents. Je me posais comme le socle, comme si je portais toute cette famille empreinte de morts plus ou moins tabous." Après l'avoir perdu, elle le dessine à nouveau, différemment. "Cette fois, j'étais collée à ma soeur aînée. Ma thérapeute a demandé si nous étions jumelles et là, j'ai commencé à percevoir que notre relation était peut-être en partie à l'origine de certaines de mes angoisses. Nous étions fusionnelles, mais nous avions un rapport assez toxique. J'étais incapable de lui dire 'Non' à l'époque, ce qui agaçait profondément mon mari." Après avoir pris en compte cette nouvelle donnée, Julia perd à nouveau son arbre. "J'ai renversé un verre d'eau dessus."
Quelques semaines plus tard, elle termine un troisième et dernier dessin. "Cette fois, ma soeur avait repris sa place d'aînée, l'espacement était normal entre nous. J'ai longuement regardé mon arbre et je me suis mise à pleurer, comme si je l'avais perdue." Des larmes qui la libèrent néanmoins d'un "poids". "Après ça, j'ai retrouvé des relations plus sereines avec elle. Les choses se sont dénouées naturellement les unes après les autres, j'ai découvert pas mal de choses qui m'ont apaisée."
"Une traversée chaotique"
L'analyse transgénérationnelle n'apporte pas pour autant de solutions clés en main à ceux qui en font l'expérience. "Comme pour une analyse classique -laquelle s'arrête généralement à l'étude de l'enfance du patient sans prendre en compte les ramifications antérieures- le thérapeute n'a pas pour fonction de 'dire' à la place du patient'", précise Christine Ulivucci. "Il ne le laisse pas errer non plus. Le but est d'accompagner, sans pour autant interpréter à la place de l'autre. La durée de l'analyse est donc assez variable, tout dépend du background thérapeutique de la personne et de sa problématique."
Si elle est précise, une dizaine de séances peuvent suffire. "Pour le reste, il faut du temps, a minima un an même si on peut toujours arrêter en cours de route. Dans tous les cas, Il faut bien comprendre qu'on ne se lance pas dans une thérapie par simple curiosité. Au départ, il y a toujours une souffrance. C'est une traversée chaotique."
L'implication plus ou moins directe de l'entourage
Une traversée d'autant plus difficile qu'elle suppose l'implication plus ou moins directe de l'entourage. Dominique, 54 ans, se souvient avoir dû remuer non sans douleur le passé de ses parents âgés: "J'ai dû leur demander des informations sur certains ancêtres que je n'ai pas connus, leur caractère, leur métier. Mais aussi soulever la question des maladies, des accidents et autres drames. En discutant, j'ai par exemple découvert que mon prénom, que j'ai toujours trouvé lourd à porter, que je n'ai même jamais aimé, avait été choisi par mes parents alors qu'ils espéraient voir naître un garçon."
Et quand les réponses sont introuvables du côté de la famille? "Il y a toujours les recherches classiques à l'état civil", note Maureen Boigen, analyste spécialiste des thérapies transgénérationnelles et auteure de L'expérience de l'arbre - guérir des mémoires familiales (éd. Chiron). Elle précise cependant: "L'idée n'est pas de monter un arbre parfait. Ce n'est pas de la généalogie au sens propre. On peut avoir un arbre incomplet, ne pas connaître son père ou grand-père biologique au début de la thérapie comme à la fin. L'important est de libérer la parole à partir de ces événements ou de ces zones d'ombre." En bref, se réapproprier son héritage familial, "avec lequel on développe des comportements dictés par une sorte de loyauté inconsciente", pour mieux s'en dégager.
Briser la transmission inconsciente
Dans son best-seller Aïe mes aïeux (éd. Desclée de Brouwer) , la psychologue Anne Ancelin-Schützenberger, pionnière de l'analyse transgénérationnelle dans les années 1970, va même plus loin en abordant la théorie du "syndrome anniversaire", lequel se traduirait par la répétition de situations plus ou moins douloureuses à travers les différentes générations d'une même famille. "Nommer les choses, verbaliser l'impensé permet de le faire exister et de briser ce schéma. Une fois les choses sues, les comportements changent, la transmission familiale devient plus fluide", indique Maureen Boigen.
Elle se souvient notamment d'un patient que la hanche faisait souffrir depuis toujours, sans raison apparente. "Pendant sa thérapie, il a découvert que ses deux grands-pères qu'il n'avait pas connus avaient tous les deux été sévèrement blessés durant la guerre de 14-18. L'un d'eux avait même été amputé de la jambe." Coïncidence ou non, peu de temps après ces révélations, l'homme retrouvait tout son équilibre physique.
La critique d'une forme de déterminisme
Y aurait-il donc un destin ou tout du moins, un déterminisme généalogique? Nos trajectoires personnelles seraient-elles irrémédiablement conditionnées par les souffrances mal digérées de nos ancêtres? Loin de provoquer le consensus dans la communauté psychanalytique, l'approche transgénérationelle et les pratiques qui en découlent -constellations familiales, repérage de dates événements...- ont régulièrement été critiquées.
"L'écueil dans lequel on peut facilement tomber est de vouloir expliquer n'importe quel trouble par le comportement de ses parents ou de ses grands-parents", constate Christophe Fauré, psychiatre et psychothérapeute. Et de poursuivre: "Cette approche, si elle est mal délimitée, peut mener à une forme de fatalité et finalement priver la personne d'autocritique." Pire, selon lui, "elle peut constituer une sorte de stratégie d'évitement. Le risque est de ne pas se confronter à soi au présent, puisque de toute façon 'ça me dépasse'".
Pas de quoi alarmer les adeptes de la pratique pour autant. "Prendre conscience de la mémoire familiale qui nous parasite, c'est reprendre possession de son libre arbitre", note Maureen Boigen. Et d'ajouter: "C'est finalement l'optique de n'importe quelle psychanalyse."
En savoir plus sur http://www.lexpress.fr/styles/psycho/psychogenealogie-quand-la-memoire-familiale-empeche-d-avancer_1661065.html#xtor=CS3-5075#UwgfmRFaKwTvzH2A.99
En vogue ces dernières années, l'analyse transgénérationnelle s'appuie sur l'étude de l'arbre généalogique de l'individu pour mieux expliquer et apaiser ses angoisses. Décryptage.
L'analyse transgénérationnelle veut que les traumatismes et non-dits vécus par les ancêtres d'un individu se répercutent sur ce dernier jusqu'à induire inconsciemment des troubles.
A la naissance de sa fille, Julia ressent le besoin impérieux de dénouer son passé. "Dans mon couple, c'était une période compliquée financièrement. J'avais l'impression de tout porter, en plus de ma fille dont je venais d'accoucher. Je me sentais angoissée, j'avais besoin d'en parler", se souvient la quadra parisienne. "Par hasard, une de mes amies elle aussi en plein questionnement existentiel à l'époque m'a parlé de l'analyse transgénérationnelle et des résultats spectaculaires prêtés à cette approche." Pendant trois ans, à raison d'une séance tous les quinze jours, Julia se rend donc chez sa thérapeute. "Lors de la première rencontre, je lui ai exposé mon mal-être. On a tout de suite commencé à construire mon arbre", raconte-elle.
L'arbre généalogique comme outil d'analyse
Fondée sur l'étude du génosociogramme, sorte d'arbre généalogique qui permet de schématiser l'histoire et les liens familiaux, l'analyse transgénérationnelle veut que les traumatismes et non-dits vécus par les ancêtres d'un individu se répercutent sur ce dernier jusqu'à induire inconsciemment des troubles, qu'ils soient de nature psychologique ou physique. Une approche pratiquée depuis plusieurs années par Christine Ulivucci, psychothérapeute de formation et auteure de Ces photos qui nous parlent (ed. Payot). "Dans le jargon, ces symptômes font partie de ce que l'on appelle le fantôme transgénérationnel", explique-t-elle.
Pour en prendre conscience, le patient dessine son arbre face au thérapeute qui va être attentif à chaque signe: un lapsus, un oubli, un espacement tantôt grand tantôt petit sur une même branche... "L'arbre agit en quelque sorte comme une interface de révélation. Il permet à la personne de symboliser et de mettre à distance les relations et événements familiaux", explique la professionnelle.
Pour Julia, l'analyse s'est avérée laborieuse: "J'ai perdu mon arbre deux fois. La première fois, je me suis inscrite tout en bas de la lignée. J'étais remontée jusqu'aux arrières grands-parents. Je me posais comme le socle, comme si je portais toute cette famille empreinte de morts plus ou moins tabous." Après l'avoir perdu, elle le dessine à nouveau, différemment. "Cette fois, j'étais collée à ma soeur aînée. Ma thérapeute a demandé si nous étions jumelles et là, j'ai commencé à percevoir que notre relation était peut-être en partie à l'origine de certaines de mes angoisses. Nous étions fusionnelles, mais nous avions un rapport assez toxique. J'étais incapable de lui dire 'Non' à l'époque, ce qui agaçait profondément mon mari." Après avoir pris en compte cette nouvelle donnée, Julia perd à nouveau son arbre. "J'ai renversé un verre d'eau dessus."
Quelques semaines plus tard, elle termine un troisième et dernier dessin. "Cette fois, ma soeur avait repris sa place d'aînée, l'espacement était normal entre nous. J'ai longuement regardé mon arbre et je me suis mise à pleurer, comme si je l'avais perdue." Des larmes qui la libèrent néanmoins d'un "poids". "Après ça, j'ai retrouvé des relations plus sereines avec elle. Les choses se sont dénouées naturellement les unes après les autres, j'ai découvert pas mal de choses qui m'ont apaisée."
"Une traversée chaotique"
L'analyse transgénérationnelle n'apporte pas pour autant de solutions clés en main à ceux qui en font l'expérience. "Comme pour une analyse classique -laquelle s'arrête généralement à l'étude de l'enfance du patient sans prendre en compte les ramifications antérieures- le thérapeute n'a pas pour fonction de 'dire' à la place du patient'", précise Christine Ulivucci. "Il ne le laisse pas errer non plus. Le but est d'accompagner, sans pour autant interpréter à la place de l'autre. La durée de l'analyse est donc assez variable, tout dépend du background thérapeutique de la personne et de sa problématique."
Si elle est précise, une dizaine de séances peuvent suffire. "Pour le reste, il faut du temps, a minima un an même si on peut toujours arrêter en cours de route. Dans tous les cas, Il faut bien comprendre qu'on ne se lance pas dans une thérapie par simple curiosité. Au départ, il y a toujours une souffrance. C'est une traversée chaotique."
L'implication plus ou moins directe de l'entourage
Une traversée d'autant plus difficile qu'elle suppose l'implication plus ou moins directe de l'entourage. Dominique, 54 ans, se souvient avoir dû remuer non sans douleur le passé de ses parents âgés: "J'ai dû leur demander des informations sur certains ancêtres que je n'ai pas connus, leur caractère, leur métier. Mais aussi soulever la question des maladies, des accidents et autres drames. En discutant, j'ai par exemple découvert que mon prénom, que j'ai toujours trouvé lourd à porter, que je n'ai même jamais aimé, avait été choisi par mes parents alors qu'ils espéraient voir naître un garçon."
Et quand les réponses sont introuvables du côté de la famille? "Il y a toujours les recherches classiques à l'état civil", note Maureen Boigen, analyste spécialiste des thérapies transgénérationnelles et auteure de L'expérience de l'arbre - guérir des mémoires familiales (éd. Chiron). Elle précise cependant: "L'idée n'est pas de monter un arbre parfait. Ce n'est pas de la généalogie au sens propre. On peut avoir un arbre incomplet, ne pas connaître son père ou grand-père biologique au début de la thérapie comme à la fin. L'important est de libérer la parole à partir de ces événements ou de ces zones d'ombre." En bref, se réapproprier son héritage familial, "avec lequel on développe des comportements dictés par une sorte de loyauté inconsciente", pour mieux s'en dégager.
Briser la transmission inconsciente
Dans son best-seller Aïe mes aïeux (éd. Desclée de Brouwer) , la psychologue Anne Ancelin-Schützenberger, pionnière de l'analyse transgénérationnelle dans les années 1970, va même plus loin en abordant la théorie du "syndrome anniversaire", lequel se traduirait par la répétition de situations plus ou moins douloureuses à travers les différentes générations d'une même famille. "Nommer les choses, verbaliser l'impensé permet de le faire exister et de briser ce schéma. Une fois les choses sues, les comportements changent, la transmission familiale devient plus fluide", indique Maureen Boigen.
Elle se souvient notamment d'un patient que la hanche faisait souffrir depuis toujours, sans raison apparente. "Pendant sa thérapie, il a découvert que ses deux grands-pères qu'il n'avait pas connus avaient tous les deux été sévèrement blessés durant la guerre de 14-18. L'un d'eux avait même été amputé de la jambe." Coïncidence ou non, peu de temps après ces révélations, l'homme retrouvait tout son équilibre physique.
La critique d'une forme de déterminisme
Y aurait-il donc un destin ou tout du moins, un déterminisme généalogique? Nos trajectoires personnelles seraient-elles irrémédiablement conditionnées par les souffrances mal digérées de nos ancêtres? Loin de provoquer le consensus dans la communauté psychanalytique, l'approche transgénérationelle et les pratiques qui en découlent -constellations familiales, repérage de dates événements...- ont régulièrement été critiquées.
"L'écueil dans lequel on peut facilement tomber est de vouloir expliquer n'importe quel trouble par le comportement de ses parents ou de ses grands-parents", constate Christophe Fauré, psychiatre et psychothérapeute. Et de poursuivre: "Cette approche, si elle est mal délimitée, peut mener à une forme de fatalité et finalement priver la personne d'autocritique." Pire, selon lui, "elle peut constituer une sorte de stratégie d'évitement. Le risque est de ne pas se confronter à soi au présent, puisque de toute façon 'ça me dépasse'".
Pas de quoi alarmer les adeptes de la pratique pour autant. "Prendre conscience de la mémoire familiale qui nous parasite, c'est reprendre possession de son libre arbitre", note Maureen Boigen. Et d'ajouter: "C'est finalement l'optique de n'importe quelle psychanalyse."
En savoir plus sur http://www.lexpress.fr/styles/psycho/psychogenealogie-quand-la-memoire-familiale-empeche-d-avancer_1661065.html#xtor=CS3-5075#UwgfmRFaKwTvzH2A.99
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