Les étranges blessures d'une jument

Neige est une superbe jument comtoise que son propriétaire, Hubert Palous, carrossier à Baraqueville, a menée ces jours derniers à l'étalon dans un pré situé au lieu-dit La Lande, à Castanet. Mercredi 20 juillet 2011 au matin, Hubert Palous découvre sa jument mutilée sous le bas-ventre.
Ses mamelles ont été arrachées, des chairs sont blessées à vif, et il y a de sérieux hématomes. Son poulain n'a que ce qui semble être des griffures superficielles. L'étalon, lui, n'a rien. Et les faits s'arrêtent là. Impossible d'identifier quelle est la bête sauvage qui a commis cela. Indignés par la barbarie et la sauvagerie de l'attaque, Hubert Palous et son frère Michel sont en attente de réponses. Qu'a-t-il bien pu se passer ? Quelle bestiole a bien pu commettre de tels dégâts ? Les frères et leur vétérinaire ont pris des clichés des blessures. Et Hubert et Michel Palous ont repéré à proximité des traces à quatre doigts avec des coussinets. Pour autant, y a-t-il un lien entre ces traces et l'agression d'une jument en pleine forme, qui pèse plus de 800 kilos ?
Les frères Palous aimeraient bien « rencontrer quelqu'un pour interpréter les clichés et les blessures, mais c'est frustrant, nous n'avons aucun interlocuteur possible. » Dans le doute, ils sont même allés porter plainte à la gendarmerie. Seule une main courante a été prise. En tous les cas, Hubert et Michel ne cèdent à aucun fantasme. « L'affaire est bien trop grave à nos yeux pour qu'on ait des certitudes. » Ils ne comprennent pas l'inertie ambiante alors que « ce désastre pourrait bien arriver à un autre éleveur. »
Même le vétérinaire qui a constaté et soigné les blessures n'a aucune idée de ce qui a bien pu arriver. Il témoigne : « pour éclaircir les faits, il faudrait mener une enquête. Or il n'y a aucun indice - pas un poil, pas une plume. » Même le fait que l'attaque soit le méfait d'un carnivore est douteux.
Alors… Il faut préciser que l'Aveyron ne compte pas de prédateurs du type des lynx, très observés et présents dans le lointain Jura seulement, et les conditions climatiques excluent une attaque de vautour, de toute façon peu probable. Le mystère reste entier.
Jean Philippe Roman, responsable du parc animalier de Pradinas, connaît bien les comportements des loups, lynx, rapaces, ours, prédateurs et animaux sauvages avec lesquels il partage une étonnante complicité depuis 25 ans. Il le prouve sur le site de Pradinas, tous les jours lors des animations interactives, pédagogiques et ludiques qu'il présente au public. Nous lui avons donc soumis quelques photos de la jument comtoise d'Hubert Palous sévèrement attaquée la semaine dernière dans sa pâture au lieu-dit Les Landes à Castanet.
D'emblée, le spécialiste écarte quelques thèses : « Un loup met d'abord sa proie à terre avant de l'attaquer. Là, en l'occurrence, vue la taille du cheval (une jument de 800 kg), il lui aurait certainement mordu les jarrets ». Or aucune trace de ce genre. L'hypothèse d'un lynx est également à écarter. « parce que comme tous les félins, il enserre sa proie et laisse de part et d'autre de larges griffures profondes au niveau du cou par exemple - or, les marques sur la jument et le poulain sont très superficielles. »
Suite à la parution de notre article sur internet, de nombreux internautes évoquent une éventuelle attaque de l'étalon. « Les mâles peuvent, effectivement, faire preuve de violence envers les juments, confirme le dresseur, mais les chevaux vivaient ensemble. Ce scénario me paraît peut crédible. »
Les traces relevées à proximité du pré ne font, en revanche, aucun doute pour Jean Philippe : « ce sont celle d'un ou de plusieurs chiens. » « La nature des blessures (mamelles arrachées, vulve mangée) me confortent dans cette hypothèse. Et ce n'est pas forcément le fait de chiens errants : il n'est pas rare de voir les chiens de troupeau s'attaquer avec plus ou moins de violence aux vaches qui viennent de mettre bas. Si la jument avait des pertes ou des saignements, cette éventualité est des plus plausibles. »
La jument victime, Neige, sous intense surveillance médicale « se remet doucement de son cauchemar », confirme son propriétaire. Les garde-chasse surveillent le secteur.