Des bébés chinois enlevés par des agents de l'État
Des enfants dans l'orphelinat Shanghaï Children's Home, en novembre 2005. Crédits photo : © NIR ELIAS / Reuters/REUTERS
Pour faire respecter la politique de l'enfant unique, ils les vendaient à des familles étrangères.
Le scandale enflamme le Web chinois. De très jeunes enfants auraient été enlevés de force à leurs parents par des fonctionnaires, pour être «vendus» illégalement à des familles étrangères désireuses d'adopter. L'affaire a été révélée par l'hebdomadaire économique Caixin, et les autorités chinoises ont immédiatement lancé une enquête. Le sujet est très sensible, car il a pour toile de fond la politique de l'«enfant unique». Et ce ne sont pas des criminels, mais des officiels qui sont impliqués dans le sinistre réseau.
Le drame a pour cadre les régions montagneuses et défavorisées du comté de Longhui, dans la province du Hunan, au centre du pays. L'histoire de Yang Libing, un pauvre travailleur migrant, lui donne chair. Le journal publie la photo de cet homme avec son jeune fils, tenant dans la main la pâle photo de sa sœur, qui vivrait aujourd'hui aux États-Unis. Cette dernière a eu 7 ans cette année. En 2005, elle est enlevée à ses parents par les autorités locales du planning familial et envoyée dans un orphelinat. Son père, sa mère ne pouvaient pas payer l'amende prévue pour avoir eu un deuxième enfant, soit 6000 yuans (environ 600 euros). On l'appelle ici «compensation de soutien social».
En leur enlevant leur fille, les services compétents entendaient les punir, mais aussi alimenter les caisses du gouvernement local. Selon Caixin, à l'aide de faux papiers, de nombreux enfants de la région ont ainsi été «vendus» par des intermédiaires, pour aboutir dans les bras de familles étrangères persuadées d'accueillir un orphelin. Pour le Hunan, cela concernerait surtout les États-Unis et les Pays-Bas. Selon la presse chinoise, le bureau du planning familial pouvait recevoir des centres d'accueil 1000 yuans (108 euros) ou plus par enfant «livré». Ces centres pouvant eux-mêmes gagner 2500 euros pour un enfant adopté à l'étranger.
Ire populaire
Dans certaines provinces de Chine, des histoires terribles racontent le drame des parents transgressant la règle de l'enfant unique. Avortements forcés, pressions sur l'emploi, démolition du domicile, tous les moyens sont parfois employés. La promotion des cadres locaux, il est vrai, dépend des bonnes statistiques qu'ils pourront afficher. Les enlèvements d'enfants par des criminels pour les revendre à l'intérieur du pays à des parents en mal de progéniture sont un fléau en Chine. Et la passivité des autorités et de la police est souvent dénoncée. Mais cette fois-ci, l'administration est directement en cause, et Pékin semble décider à sévir pour apaiser l'ire populaire.
Le sujet, toutefois, reste délicat. Le militant Chen Guangcheng a ainsi été emprisonné quatre ans pour avoir tenté d'attirer l'attention sur les avortements forcés dans sa province du Shandong. Relâché en septembre dernier, cet homme aveugle a été battu par la police pour avoir dénoncé ses conditions de détention et il est aujourd'hui en résidence surveillée, isolé du monde extérieur.
Par Arnaud de La Grange
SOURCE Le Figaro
Des enfants dans l'orphelinat Shanghaï Children's Home, en novembre 2005. Crédits photo : © NIR ELIAS / Reuters/REUTERS
Pour faire respecter la politique de l'enfant unique, ils les vendaient à des familles étrangères.
Le scandale enflamme le Web chinois. De très jeunes enfants auraient été enlevés de force à leurs parents par des fonctionnaires, pour être «vendus» illégalement à des familles étrangères désireuses d'adopter. L'affaire a été révélée par l'hebdomadaire économique Caixin, et les autorités chinoises ont immédiatement lancé une enquête. Le sujet est très sensible, car il a pour toile de fond la politique de l'«enfant unique». Et ce ne sont pas des criminels, mais des officiels qui sont impliqués dans le sinistre réseau.
Le drame a pour cadre les régions montagneuses et défavorisées du comté de Longhui, dans la province du Hunan, au centre du pays. L'histoire de Yang Libing, un pauvre travailleur migrant, lui donne chair. Le journal publie la photo de cet homme avec son jeune fils, tenant dans la main la pâle photo de sa sœur, qui vivrait aujourd'hui aux États-Unis. Cette dernière a eu 7 ans cette année. En 2005, elle est enlevée à ses parents par les autorités locales du planning familial et envoyée dans un orphelinat. Son père, sa mère ne pouvaient pas payer l'amende prévue pour avoir eu un deuxième enfant, soit 6000 yuans (environ 600 euros). On l'appelle ici «compensation de soutien social».
En leur enlevant leur fille, les services compétents entendaient les punir, mais aussi alimenter les caisses du gouvernement local. Selon Caixin, à l'aide de faux papiers, de nombreux enfants de la région ont ainsi été «vendus» par des intermédiaires, pour aboutir dans les bras de familles étrangères persuadées d'accueillir un orphelin. Pour le Hunan, cela concernerait surtout les États-Unis et les Pays-Bas. Selon la presse chinoise, le bureau du planning familial pouvait recevoir des centres d'accueil 1000 yuans (108 euros) ou plus par enfant «livré». Ces centres pouvant eux-mêmes gagner 2500 euros pour un enfant adopté à l'étranger.
Ire populaire
Dans certaines provinces de Chine, des histoires terribles racontent le drame des parents transgressant la règle de l'enfant unique. Avortements forcés, pressions sur l'emploi, démolition du domicile, tous les moyens sont parfois employés. La promotion des cadres locaux, il est vrai, dépend des bonnes statistiques qu'ils pourront afficher. Les enlèvements d'enfants par des criminels pour les revendre à l'intérieur du pays à des parents en mal de progéniture sont un fléau en Chine. Et la passivité des autorités et de la police est souvent dénoncée. Mais cette fois-ci, l'administration est directement en cause, et Pékin semble décider à sévir pour apaiser l'ire populaire.
Le sujet, toutefois, reste délicat. Le militant Chen Guangcheng a ainsi été emprisonné quatre ans pour avoir tenté d'attirer l'attention sur les avortements forcés dans sa province du Shandong. Relâché en septembre dernier, cet homme aveugle a été battu par la police pour avoir dénoncé ses conditions de détention et il est aujourd'hui en résidence surveillée, isolé du monde extérieur.
Par Arnaud de La Grange
SOURCE Le Figaro
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