Sa main est guidée par l'au-delà

Imaginez : vous êtes incapable de tracer un carré sur une feuille blanche mais, lors de moments de transe intense, vous peignez des toiles dont le style, la patte et la signature rappellent à s'y méprendre des artistes célèbres disparus. Science-fiction? C'est pourtant ce qui est arrivé à Luiz Gasparetto.



Nous sommes au Brésil, au milieu des années '50. Le petit Luiz fait le désespoir de ses parents. A l'école, ses résultats ne sont pas à la hauteur des ambitions parentales. La seule chose qui l'intéresse, c'est le samedi, lorsqu'il peut suivre des leçons de spiritisme avec son papa. Un père qui ne s'étonnera pas outre mesure lorsque son rejeton entrera un jour en transe et se jettera littéralement sur un crayon.

Son premier dessin, il le fait sur le mur de la cuisine. Le résultat est bluffant. Le dessin rappelle vaguement quelque chose au père qui, après quelques recherches, reconnaît la patte de Leonard de Vinci.

Les transes se multiplient. En quelques semaines, Luiz peint des centaines de toiles. Les parents sont abasourdis, mais la rumeur enfle. Bientôt des caméras de télévision se pressent à l'entrée de la maison. Le petit garçon, lui, ne peut que répéter sa vérité. Des messieurs s'approchent de lui – dans sa tête – et s'emparent de ses mains pour peindre à sa place. Il n'en faut pas plus pour en faire une star des plateaux de télévision brésiliens, puis mondiaux.

Habitué à peindre dans la pénombre, Luis est quelque peu gêné par les spots indispensables sur un plateau. Mais il s'y fera vite et continuera à surprendre les experts du monde entier. Il multiplie les techniques propres à des peintres comme Monnet, Toulouse-Lautrec ou Van Gogh.

Certaines personnes mal intentionnées lui font même des propositions malhonnêtes tant le style et la signature sont susceptibles tromper les spécialistes les plus avertis. Mais Luis sent que cette voie n'est pas possible et que dans l'illégalité, ses visiteurs le laisseront tomber.

Au fil du temps, les sollicitations sont fortes et Lui crée une émission de télévision qui, aujourd'hui encore, connaît un joli succès. On peut l'y voir peindre plus de 21 tableaux en 75 minutes. Le plus souvent, il a les yeux fermés et peut peindre de la main droite et de la main gauche simultanément. A chaque fois, le verdict est le même : la reproduction est parfaitement conforme à l'original.

La bonne nouvelle, c'est que Luiz peut voir les peintres qui s'approchent de lui. Pour lui, cela ne fait aucun doute : nous gardons notre apparence dans l'au-delà. Mieux, nous perdons même nos handicaps. Ainsi, Toulouse-Lautrec ne boîte plus quand il vient prendre la main de son protégé.

La mauvaise nouvelle ? Luis Gasparetto ne sait plus où entreposer les milliers de toiles déjà produites...