Saut supersonique: «J'irai plus haut que Felix Baumgartner et je lui ferai un petit coucou!»
Le parachutiste Michel Fournier teste son matériel le 30 mars 2005 à Marseille dans un caisson hyperbare lors d'une opération de simulation d'altitude pour réaliser son projet de «grand saut» à 40.000m d'altitude B.HORVAT /AFP
INTERVIEW - Retraité de l'armée et parachutiste hors pair, Michel Fournier, un Français de 68 ans, veut battre le record de l'Autrichien...
Michel Fournier se dit «modeste» et pas «jaloux», mais le projet de Felix Baumgartner, c’était le sien. Enfin celui du gouvernement français à la fin des années 1980 jusqu’à ce que cet ancien parachutiste de l’armée âgé de 68 ans, dernier candidat en lice retenu pour «Le Grand Saut», reprenne la tentative d’exploit à son compte. Mais depuis, l’«Autrichien volant» est passé par là et a accompli le saut supersonique de 39.000 mètres. Contacté par 20 Minutes, Michel Fournier explique comment il compte battre ce record.
En quoi consiste «Le Grand Saut»?
A l’origine, c’est un projet européen de saut à 38.000 mètres effectué dans le cadre de la navette spatiale européenne Hermès et qui a pour but de développer le moyen de sauvetage des spationautes. Nous étions 78 candidats et j’ai fait partie des trois derniers retenus pour ce saut à la fin des années 1980. Quand le projet a été abandonné, je l’ai repris à titre personnel avec l’objectif de sauter à plus de 40.000 mètres avec un ballon plus gros que celui de Felix Baumgartner.
Qu’avez-vous pensé de son saut?
C’est mon projet. Quand je l’ai vu, intérieurement, j’ai eu un gros nœud, c’est frustrant. Felix Baumgartner a eu la chance de Red Bull. Moi il me manque 250.000 euros pour financer mon projet.
Quand avez-vous prévu de sauter et pourquoi au Canada?
Je n’ai pas encore de date précise pour mon saut, cela dépendra du financement et ensuite de la météo. Ce sera au Canada parce que je n’ai pas d’autorisation en France. Ici, la conquête spatiale n’intéresse personne.
Vous avez effectué plusieurs tentatives au cours des années 2000, qu’est-ce qui n’a pas marché?
Felix Baumgartner est parti avec plusieurs ballons coûtant chacun 250.000 euros et c’est son dernier qui a fonctionné. Je suis très admiratif de sa réussite, mais moi je n’en avais qu’un seul à chaque fois et ils n’ont pas fonctionné.
Comment vous préparez-vous à ce saut?
J’ai tout un staff scientifique et médical qui me suit. Je m’entraîne quotidiennement, je fais du sport, des entraînements en caisson ou en centrifugeuse à la Cité des Etoiles en Russie. C’est un véritable entraînement de pilote de chasse car c’est un saut très technique. Celui de Felix Baumgartner était un peu hollywoodien. Quand je l’ai vu tourner, je me suis posé des questions, j’ai eu peur pour lui.
Et ressentez-vous de la peur pour vous-même?
J’ai plus de 8.700 sauts en parachute à mon actif dont un record de France à 12.000 mètres (contesté par le parachutiste Patrick de Gavardon, ndlr) et je saute encore deux fois chaque week-end. La peur, c’est quand on ne connaît pas. Cette peur, j’y ai été confronté, notamment pendant mes entraînements en caisson, mais cela m’a permis de savoir à quoi j’allais être confronté. De plus, on est confronté aux risques tous les jours, ne serait-ce qu’en prenant sa voiture. D’ailleurs, les seuls accidents que j’ai eus, c’était en moto. Ce qu’il faut, c’est être suffisamment fort pour réagir. Souvent, les accidents de parachute ont lieu quand on a peur, qu’on panique et qu’on n’ouvre pas son parachute de secours. C’est pour cela que le yoga fait notamment partie de ma préparation. Au final, la préparation mentale est plus forte que la préparation physique.
Qu’est-ce qui vous attire tellement dans ce projet?
D’abord, c’est le sport, la chute libre. C’est une passion, ça ne s’explique pas. Puis quand vous avez mis le doigt dans l’engrenage de la recherche, vous voulez comprendre. Cela dépasse la passion, ça va bien au-delà. Quand on pense à Magellan, Youri Gagarine ou encore Neil Armstrong, il a fallu des gens pour explorer des territoires inconnus. Aujourd’hui, il y a aussi des gens qui meurent pour cela, mais cela apporte quelque chose à l’humanité qui doit avancer et connaître les limites de la nature.
Désormais, comment comptez-vous parvenir à concrétiser votre projet?
Grâce à la médiatisation. Il a fallu le saut de Felix Baumgartner pour qu’on s’intéresse à moi. C’est un petit peu frustrant car on prend conscience que maintenant, c’est possible. J’avais déjà contacté des patrons de grands groupes, mais ils ont eu peur d’associer leur nom à la mort possible d’un parachutiste. Maintenant, je peux remercier Felix Baumgartner parce que cela va me relancer. J’irai plus haut que lui et je lui ferai un petit coucou!
Propos recueillis par Corentin Chauvel
Le parachutiste Michel Fournier teste son matériel le 30 mars 2005 à Marseille dans un caisson hyperbare lors d'une opération de simulation d'altitude pour réaliser son projet de «grand saut» à 40.000m d'altitude B.HORVAT /AFP
INTERVIEW - Retraité de l'armée et parachutiste hors pair, Michel Fournier, un Français de 68 ans, veut battre le record de l'Autrichien...
Michel Fournier se dit «modeste» et pas «jaloux», mais le projet de Felix Baumgartner, c’était le sien. Enfin celui du gouvernement français à la fin des années 1980 jusqu’à ce que cet ancien parachutiste de l’armée âgé de 68 ans, dernier candidat en lice retenu pour «Le Grand Saut», reprenne la tentative d’exploit à son compte. Mais depuis, l’«Autrichien volant» est passé par là et a accompli le saut supersonique de 39.000 mètres. Contacté par 20 Minutes, Michel Fournier explique comment il compte battre ce record.
En quoi consiste «Le Grand Saut»?
A l’origine, c’est un projet européen de saut à 38.000 mètres effectué dans le cadre de la navette spatiale européenne Hermès et qui a pour but de développer le moyen de sauvetage des spationautes. Nous étions 78 candidats et j’ai fait partie des trois derniers retenus pour ce saut à la fin des années 1980. Quand le projet a été abandonné, je l’ai repris à titre personnel avec l’objectif de sauter à plus de 40.000 mètres avec un ballon plus gros que celui de Felix Baumgartner.
Qu’avez-vous pensé de son saut?
C’est mon projet. Quand je l’ai vu, intérieurement, j’ai eu un gros nœud, c’est frustrant. Felix Baumgartner a eu la chance de Red Bull. Moi il me manque 250.000 euros pour financer mon projet.
Quand avez-vous prévu de sauter et pourquoi au Canada?
Je n’ai pas encore de date précise pour mon saut, cela dépendra du financement et ensuite de la météo. Ce sera au Canada parce que je n’ai pas d’autorisation en France. Ici, la conquête spatiale n’intéresse personne.
Vous avez effectué plusieurs tentatives au cours des années 2000, qu’est-ce qui n’a pas marché?
Felix Baumgartner est parti avec plusieurs ballons coûtant chacun 250.000 euros et c’est son dernier qui a fonctionné. Je suis très admiratif de sa réussite, mais moi je n’en avais qu’un seul à chaque fois et ils n’ont pas fonctionné.
Comment vous préparez-vous à ce saut?
J’ai tout un staff scientifique et médical qui me suit. Je m’entraîne quotidiennement, je fais du sport, des entraînements en caisson ou en centrifugeuse à la Cité des Etoiles en Russie. C’est un véritable entraînement de pilote de chasse car c’est un saut très technique. Celui de Felix Baumgartner était un peu hollywoodien. Quand je l’ai vu tourner, je me suis posé des questions, j’ai eu peur pour lui.
Et ressentez-vous de la peur pour vous-même?
J’ai plus de 8.700 sauts en parachute à mon actif dont un record de France à 12.000 mètres (contesté par le parachutiste Patrick de Gavardon, ndlr) et je saute encore deux fois chaque week-end. La peur, c’est quand on ne connaît pas. Cette peur, j’y ai été confronté, notamment pendant mes entraînements en caisson, mais cela m’a permis de savoir à quoi j’allais être confronté. De plus, on est confronté aux risques tous les jours, ne serait-ce qu’en prenant sa voiture. D’ailleurs, les seuls accidents que j’ai eus, c’était en moto. Ce qu’il faut, c’est être suffisamment fort pour réagir. Souvent, les accidents de parachute ont lieu quand on a peur, qu’on panique et qu’on n’ouvre pas son parachute de secours. C’est pour cela que le yoga fait notamment partie de ma préparation. Au final, la préparation mentale est plus forte que la préparation physique.
Qu’est-ce qui vous attire tellement dans ce projet?
D’abord, c’est le sport, la chute libre. C’est une passion, ça ne s’explique pas. Puis quand vous avez mis le doigt dans l’engrenage de la recherche, vous voulez comprendre. Cela dépasse la passion, ça va bien au-delà. Quand on pense à Magellan, Youri Gagarine ou encore Neil Armstrong, il a fallu des gens pour explorer des territoires inconnus. Aujourd’hui, il y a aussi des gens qui meurent pour cela, mais cela apporte quelque chose à l’humanité qui doit avancer et connaître les limites de la nature.
Désormais, comment comptez-vous parvenir à concrétiser votre projet?
Grâce à la médiatisation. Il a fallu le saut de Felix Baumgartner pour qu’on s’intéresse à moi. C’est un petit peu frustrant car on prend conscience que maintenant, c’est possible. J’avais déjà contacté des patrons de grands groupes, mais ils ont eu peur d’associer leur nom à la mort possible d’un parachutiste. Maintenant, je peux remercier Felix Baumgartner parce que cela va me relancer. J’irai plus haut que lui et je lui ferai un petit coucou!
Propos recueillis par Corentin Chauvel
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