La seconde édition du livre Witness to Roswell (mai 2009) révèle encore de nouveaux témoins
Gildas Bourdais, juin 2009
En juin 2007, la première édition du livre Witness to Roswell, de Tom Carey et Donald Schmitt, avait déjà révélé une remarquable série de nouveaux témoins et avait largement contribué à renouveler l’intérêt pour l’affaire de Roswell dans les médias, en même temps que le soixantième anniversaire du crash célébré dans la ville de Roswell. En fait, les auteurs n’avaient pas tout livré dans leur livre, notamment parce que l’éditeur s’était permis de l’élaguer, m’ont-ils raconté. Mais le succès du livre a convaincu l’éditeur de faire une nouvelle édition, plus complète, qui a fini par paraître en mai 2009. Entretemps, les auteurs ont continué à enquêter et ont pu ajouter de nouveaux témoignages qui renforcent encore l’histoire. Le livre est ainsi passé de 256 pages à 318 pages.
Les sceptiques ne manqueront pas de se demander comment il est possible de trouver encore des témoins, même indirects, sur une affaire vieille de plus de soixante ans. Mais les auteurs s’en expliquent au début du livre. Ils reconnaissent qu’au moins 90% des militaires stationnés à Roswell en 1947 sont morts, ou ne sont plus en état d’être interviewés. En revanche, certains ont accepté de parler, se sentant proches de leur fin. C’est le cas de plusieurs nouveaux témoins révélés dans cette seconde édition, militaires ou civils. Ainsi, paradoxalement, certains se décident à parler du fait même de leur grand âge car ils en éprouvent, sans doute, le besoin moral et ne craignent plus ni menaces, ni sanctions. On voit aussi des langues se délier parmi les proches et amis de témoins décédés. De plus, le nombre déjà impressionnant de témoins ne peut que les encourager dans cette démarche.
On peut s’attendre également à ce que d’autres témoignages émergent peu à peu sur ce qui s’est passé après Roswell, sur les études qui auraient suivi, notamment à Wright-Patterson, la base technique de l’armée de l’Air, dans l’Ohio. Un exemple en est fourni, justement, dans ce livre, avec une enquête parallèle d’Anthony Bragalia, un « collègue » de Carey et Schmitt, qui a trouvé des indices concordants sur une étude très secrète des fameuses feuilles « à mémoire de forme », qui aurait été menée au Battelle Memorial Institute, déjà bien connu en ufologie comme auteur d’une excellente étude statistique sur les observations d’ovnis faite au début des années cinquante pour le compte de l’armée de l’Air, laquelle fut ensuite publiée sous le nom de « Rapport 14 » de la commission Blue Book.
Autrement dit, le dossier déjà si épais de Roswell n’est pas mort et nous réserve encore, probablement, des surprises… La seule critique que j’ai à faire est qu’ils n’ont pas suivi les suggestions que je leur avais faites en 2007 et 2008 pour modifier un peu la chronologie des événements, alors que Don Schmitt m’avait dit être d’accord avec moi, en septembre 2008. La discussion reste donc ouverte, me semble-t-il, sur la chronologie détaillée, mais c’est un aspect que nous pouvons, pour l’heure, laisser de côté. Voyons brièvement les nouveaux témoignages, dans l’ordre où ils apparaissent dans le livre.
Au chapitre 5, les auteurs ajoutent une page curieuse sur une probable manœuvre de désinformation militaire. Le 7 juillet, Alan Grant, jeune photographe de Life Magazine, est expédié par son journal sur les lieux, via Albuquerque. Il y est conduit dans un petit avion piloté par le Major Charles Philips. Celui-ci l’oblige, curieusement, à prendre une arme, puis se pose dans un coin désertique où ils ne trouvent rien. Chou blanc pour Life Magazine, qui ne va rien publier sur Roswell, ce qui va peut-être inciter d’autres médias à faire de même…
Au chapitre 6, qui relate notamment déboires du fermier Brazel et de son fils Bill, de nouvelles informations sont fournies sur les menaces subies par des témoins après l’incident. Selon l’ancien sergent Bert Schulz, qui était électricien pour les bombardiers B-29, certains soldats de la base se sont vantés, au cours des mois suivants, d’avoir participé aux actions d’intimidation subies par les civils dans la région. Un officier du nom de Hunter G. Penn s’était distingué par sa brutalité dans ce travail. Mais il aurait confirmé plus tard à sa propre fille que l’engin accidenté était bien d’origine extraterrestre !
Au chapitre 7, les auteurs révèlent un aspect complètement occulté jusqu’à présent. Brazel avait informé de sa découverte ses patrons, les frères jumeaux H.et J.B. (Jap) Foster qui vivaient au Texas sur d’autres terres. Il les avait appelés depuis le village de Corona où nous savons déjà qu’il était allé le samedi 6 juillet pour montrer des débris. Ceci a été précisé par Geraldine Perkins, épicière qui avait l’unique ligne téléphonique ! Selon Jo Ann Purdie, fille de J.B. Foster, son père savait donc ce qui s’était passé, mais n’en avait pas parlé car avait été menacé lui aussi, comme Brazel, par les militaires.
Dans le même chapitre, Carey et Schmitt font une autre révélation bien intéressante. Bessie Schreiber, la fille du fermier Brazel, qui était un témoin mis en avant par l’armée en 1995 et par les sceptiques tels que Philip Klass et Karl Pflock, en faveur de la thèse d’une confusion avec des ballons, a fini par revenir sur cette idée. Elle s’est ralliée à l’opinion, quelque temps avant sa mort, que son père avait effectivement vu autre chose.
Au chapitre 8, un autre témoin aurait confirmé que le Major Marcel avait bien vu les cadavres, très probablement sur le troisième site proche du champ de débris. Hayes Marcel, un neveu âgé de 77 ans a entendu un cousin de Jesse, Nelson Marcel, en parler : « Jesse a dit qu’il les avait vus » ; selon lui, Jesse avait aussi gardé un morceau de « métal alien incasssable ». Ce morceau sera-t-il retrouvé un jour ?
Le chapitre 9 apporte quelques éléments en marge de l’histoire, déjà compliquée dans le premier livre, de Joseph Montoya, gouverneur adjoint du Nouveau-Mexique à l’époque, qui se serait trouvé sur la base et aurait vu les cadavres entreposés brièvement dans le hangar P 3 (aujourd’hui bâtiment 84, et non pas « hangar 18 » : ce dernier appartient à la légende de la base de Wright-Patterson !). Ce sont des indications sur les allées et venues d’autres hommes politiques de la région : le gouverneur Tom Mabry avait pris soudain un congé imprévu, et une réunion programmée avec le colonel Blanchard pour le 9 juillet avait été reportée. D’autre part, Le sénateur Carl Hatch avait demandé au Président Truman à être reçu d’urgence, le 7 juillet. On en ignore le motif, mais c’est enregistré dans les archives du Président… Or nous savons déjà qu’il y avait eu beaucoup d’agitation dans les hautes sphères pendant ces journées cruciales des 7 et 8 juillet, comme je l’ai décrit dans mon livre Le crash de Roswell. Grosse agitation au sommet pour quelques ballons !
Au chapitre 11, sont révélés de nouveaux témoins sur le site de l’ovni proche de Roswell (qu’ils appellent « impact site »), ainsi que sur le convoi qui l’a transporté à la base. James Strom, selon son beau-frère John Tilley, a escorté le convoi à travers Roswell en fin d’après-midi. Bill Blair a confirmé l’entreposage au hangar P 3. De nouveaux témoins confirment les rumeurs qui circulaient à la base sur le crash : les sergents Harvie Davis et Leonard Hardy, les soldats John Bunch et Eugene Helnes.
D’autres témoins militaires, directs ou indirects, ont encore été retrouvés : selon sa femme Mary, le soldat Frank Martinez a conduit des camions vers le ranch Foster pendant deux jours d’affilée. En juillet 2008, l’ancien sergent William Ennis, ami d’Earl Fulford (un témoin important de la première édition, décédé le 3 août 2008) qui était ingénieur de vol sur B-29, a fini pas avouer qu’il avait vu l’ovni et il a fait ce commentaire : « Il n’y avait pas de moteur ! Avant de m’en aller, je voudrais bien savoir. »
Enfin, un autre témoin, George Newling, soutient qu’il a vu, en novembre 1947, une partie de l’ovni être évacuée par un bombardier B-29, surnommé « Up an’ Atom ». Ce témoignage soulève cependant une question : s’il est correct, que penser alors de celui du lieutenant-colonel Magruder qui a dit à ses fils (selon la première édition du livre) qu’il avait vu l’ovni et le survivant sur la base de Wright à la mi-juillet 1947 ? Eh bien, la nouvelle édition corrige cette date : c’était en fait au printemps de 1948 ! On voit bien ici que certains témoignages seront à recouper et à confirmer, si possible, au cours des mois et des années qui viennent.
Le chapitres 13 et 14 apportent de nouveaux éléments sur ce qui s’est passé à l’hôpital de la base. Ce sont d’abord de nouveaux témoins en faveur de Glenn Dennis : Barbara Perez, Adam Dutchover, Garner Mason, Rex Alcorn, Clifford Butts, William Burkstaller, et Richard Bean semblent confirmer solidement son récit sur les révélations de la mystérieuse infirmière qui avait participé à une autopsie et lui avait décrit les cadavres. Un enquête pointue et des recoupements, racontés dans le livre, semblent avoir permis de retrouver finalement son identité : elle s’appellerait Mary Crowley Lowe et habiterait encore à Roswell même. Elle avait fait promettre à Glenn de ne jamais révéler son identité, d’où ses mensonges maladroits pour la protéger. Finalement, pressé par les enquêteurs, il l’a presque admis, mais s’est récusé le lendemain ! La photo de l’ancienne infirmière, âgée, est dans le livre, fournie par Wendy Connors, autre enquêtrice tenace qui a participé à cette recherche.
Le chapitre 15 apporte de nouvelles précisions sur la description des cadavres et sur les autopsies qui auraient suivi. Le Dr Lejeune Foster, qui avait une clinique à San Diego, et avait une accréditation au « top secret », y aurait participé pendant un mois, non pas à Wright Field, mais plutôt à Washington.
Le chapitre 18 nous révèle encore un nouveau « lot » de témoins, cette fois des civils de la région. Ils confirment que les informations sur l’accident circulaient avant même l’intervention des militaires sur le terrain, qui les ont ensuite menacés. Selon Sue Farnsworth, son père avait été menacé pour avoir vu l’ovni ; selon George Cisneros, plusieurs voisins qui l’avaient vu furent eux aussi menacés. Un autre témoignage civil, très intéressant, est celui d’un ingénieur de Boeing, Richard Loveridge, qui était chargé d’enquêter sur les accidents d’avion de sa compagnie, en l’occurrence les bombardiers B-29. Il a fini par avouer à son fils Douglas, qui le pressait de questions depuis des années, sachant qu’il avait vécu à Roswell ces années-là, qu’il était allé lui aussi sur le site et « avait tout vu » : l’ovni, les cadavres et le survivant !
Le livre apporte encore d’autres éléments nouveaux par rapport à la première édition, pourtant déjà si riche. On apprend par exemple que Walter Haut été lui-même menacé pendant de nombreuses années, notamment par le fils du général Kingsbury, pour le dissuader de parler. En somme, sa réponse a été sa déclaration posthume. Le témoignage du sergent Homer Rowlette, qui avait vu l’ovni et les cadavres selon son fils Larry et sa fille Carlene Green, est maintenant confirmé par deux autres sources : le sergent Harry Telesco, selon sa fille, et le soldat James Saine, selon des membres survivants de sa famille. Mais il faut reconnaître que ces nouveaux témoignages sont maintenant, le plus souvent, indirects.
Le livre révèle, pour finir, une piste sur une étude secrète qui a peut-être suivi le crash de Roswell. Comme je l’ai déjà dit au début de cet article, des feuilles métalliques à mémoire de forme, provenant du crash, auraient été étudiées au Battelle Institute dès la fin des années quarante, selon une enquête qui semble bien documentée d’Anthony Bragalia. Si cette histoire est vraie, et que des informations ont été passées discrètement à des laboratoires publics et privés pour avancer dans les recherches, cela finira, peut-être, par être un jour confirmé…
On voit que cette nouvelle édition consolide encore le dossier de Roswell. Mais les vrais sceptiques attendront de toucher, comme saint Thomas, un « vrai » débris de Roswell servi sur un plateau !
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