(Source : Libelyon, Photos : pointsdactu)
C’est un mystère particulièrement romanesque. A quoi ont pu servir les galeries voûtées qui se croisent sous la colline de la Croix-Rousse. Et de quand datent-elles ? On les appelle les "arêtes de poisson", pour leur forme curieuse. Des tubes en pierre comme des épines dorsales, coupées régulièrement par des plus petits tunnels perpendiculaires. Cela monte, cela descend sous la colline, au moyen d’échelles, d’escaliers. Un réseau spectaculaire, relié à la surface par des puits, la plupart rebouchés. Il est connu depuis 1933. Mais une étude récente du service archéologique municipal de Lyon, avant le percement d’un nouveau tunnel sous la Croix-Rousse, révèle son ampleur. Et formule une hypothèse nouvelle : les galeries auraient été construites juste après le Moyen-âge, et auraient servi à la fois d’acheminement depuis le Rhône et d’entrepôt pour une citadelle éphémère bâtie sur ordre du roi en haut de la colline. Un travail titanesque.
Au milieu du 17e siècle, un fontainier avait découvert par hasard l’une des galeries, en creusant pour alimenter les fontaines de l’hôtel de ville, en bas des pentes de la Croix-Rousse. Il s’en était servi pour l’adduction. Un siècle plus tard, Jacques-Germain Soufflot a mis à son tour une partie du réseau au jour. Alors qu’il faisait construire des immeubles de rapport le long du Rhône, il est tombé sur un tunnel inondé, dont il s’est servi pour alimenter en eau ses riverains. D’autres découvertes ont suivi, révélant en 1933 puis 1955 un réseau très complet, inédit.
La campagne d’archéologie préventive précédant le futurs travaux de percement du deuxième tunnel a permis cette fois une étude de six semaines sur le terrain (enfin plutôt en-dessous), et d’importantes recherches documentaires. Les archéologues ont d’abord découvert que le réseau des arêtes se trouvait connecté à un autre, plus au Nord et relié par une galerie. Au total deux kilomètres, et plus de quatre-cents mètres de puits, parfois profonds de vingt-cinq mètres.
Dans les galeries, sous le mortier du sol, des radiers (fondation d’un ouvrage) composés de grosses pierres, sans doute pour drainer l’eau, assécher le réseau. Au mur, des dessins en relief faits avec des doigts, et des empreintes de mains enfantines qui auraient aidé à la finition. Certaines des galeries sont reliées par de vastes salles voûtées, une partie taguée par des noctambules.
Ne disposant d’aucune trace de cette construction dans les archives, les archéologues ont fonctionné par déduction. Ils ont observé que l’ensemble était construit avec des moellons calcaires, roches rougeâtres qui viendraient des bords de Saône, peut-être de la région mâconnaise. Un type de matériaux pas utilisé à Lyon avant la fin du Moyen-âge. Peu après ce dernier, en 1564, Charles IX et sa mère Catherine de Médicis ont fait ériger sur la Croix-Rousse une forteresse royale, en pleine guerre de religion, en pleine peste aussi. Du haut de la coline, la bâtisse devait pacifier la ville, la surveiller en surplomb. Or les épines dorsales du réseau souterrain sont strictement parallèles à certains murs d’enceinte bâtis au milieu du 16e, ce qui conforte la datation.
A quoi devaient servir à l’époque ces galeries ? Un accès part du Rhône puis cela sillonne sous la colline pour remonter grâce aux puits à l’intérieur de l’ancienne forteresse. Elles auraient, supposent les archéologues, été conçues pour acheminer depuis le fleuve hommes et matériel. D’autres auraient été conçues comme des subsistances : des entrepôts militaires permettant de stocker armes et vivres. Ce n’est encore qu’une hypothèse, difficile à étayer.
Les galeries n’auraient jamais servi, du moins pour du stockage : pas de traces d’entreposages, pas de mobilier archéologique, de débris. Pas d’ancrages au mur, aucun système de fixation pour l’éclairage, par de traces de suie aux murs. La citadelle a été démolie en 1585, aux frais des Lyonnais. Il n’en reste quasiment aucune trace, et pas un plan à Lyon. Le seul qui a été retrouvé pour l’instant se trouvait à Turin, peut-être ramené là au 16e siècle par un espion, histoire d’ajouter au romanesque de cette affaire.
Les découvertes effectuées dans le cadre d’une campagne d’archéologie préventive s’arrêtent là. Aucune prescription n’a été faite pour prolonger les recherches, les travaux de percement du tunnel ne touchant, selon Gilles Buna, adjoint à l’Urbanisme, que la partie inférieure des arêtes, "sur une distance de cinquante mètres", et à un endroit où les galeries ont déjà été partiellement bétonnées. L’élu a visité le réseau lundi matin, se promet de ne pas le refaire tant le parcours est sportif, assez accidenté pour interdire selon lui un accès à des visiteurs. Seule une petite partie pourrait un jour être aménagée, comme dans les catacombes parisiennes.
C’est un mystère particulièrement romanesque. A quoi ont pu servir les galeries voûtées qui se croisent sous la colline de la Croix-Rousse. Et de quand datent-elles ? On les appelle les "arêtes de poisson", pour leur forme curieuse. Des tubes en pierre comme des épines dorsales, coupées régulièrement par des plus petits tunnels perpendiculaires. Cela monte, cela descend sous la colline, au moyen d’échelles, d’escaliers. Un réseau spectaculaire, relié à la surface par des puits, la plupart rebouchés. Il est connu depuis 1933. Mais une étude récente du service archéologique municipal de Lyon, avant le percement d’un nouveau tunnel sous la Croix-Rousse, révèle son ampleur. Et formule une hypothèse nouvelle : les galeries auraient été construites juste après le Moyen-âge, et auraient servi à la fois d’acheminement depuis le Rhône et d’entrepôt pour une citadelle éphémère bâtie sur ordre du roi en haut de la colline. Un travail titanesque.
Au milieu du 17e siècle, un fontainier avait découvert par hasard l’une des galeries, en creusant pour alimenter les fontaines de l’hôtel de ville, en bas des pentes de la Croix-Rousse. Il s’en était servi pour l’adduction. Un siècle plus tard, Jacques-Germain Soufflot a mis à son tour une partie du réseau au jour. Alors qu’il faisait construire des immeubles de rapport le long du Rhône, il est tombé sur un tunnel inondé, dont il s’est servi pour alimenter en eau ses riverains. D’autres découvertes ont suivi, révélant en 1933 puis 1955 un réseau très complet, inédit.
La campagne d’archéologie préventive précédant le futurs travaux de percement du deuxième tunnel a permis cette fois une étude de six semaines sur le terrain (enfin plutôt en-dessous), et d’importantes recherches documentaires. Les archéologues ont d’abord découvert que le réseau des arêtes se trouvait connecté à un autre, plus au Nord et relié par une galerie. Au total deux kilomètres, et plus de quatre-cents mètres de puits, parfois profonds de vingt-cinq mètres.
Dans les galeries, sous le mortier du sol, des radiers (fondation d’un ouvrage) composés de grosses pierres, sans doute pour drainer l’eau, assécher le réseau. Au mur, des dessins en relief faits avec des doigts, et des empreintes de mains enfantines qui auraient aidé à la finition. Certaines des galeries sont reliées par de vastes salles voûtées, une partie taguée par des noctambules.
Ne disposant d’aucune trace de cette construction dans les archives, les archéologues ont fonctionné par déduction. Ils ont observé que l’ensemble était construit avec des moellons calcaires, roches rougeâtres qui viendraient des bords de Saône, peut-être de la région mâconnaise. Un type de matériaux pas utilisé à Lyon avant la fin du Moyen-âge. Peu après ce dernier, en 1564, Charles IX et sa mère Catherine de Médicis ont fait ériger sur la Croix-Rousse une forteresse royale, en pleine guerre de religion, en pleine peste aussi. Du haut de la coline, la bâtisse devait pacifier la ville, la surveiller en surplomb. Or les épines dorsales du réseau souterrain sont strictement parallèles à certains murs d’enceinte bâtis au milieu du 16e, ce qui conforte la datation.
A quoi devaient servir à l’époque ces galeries ? Un accès part du Rhône puis cela sillonne sous la colline pour remonter grâce aux puits à l’intérieur de l’ancienne forteresse. Elles auraient, supposent les archéologues, été conçues pour acheminer depuis le fleuve hommes et matériel. D’autres auraient été conçues comme des subsistances : des entrepôts militaires permettant de stocker armes et vivres. Ce n’est encore qu’une hypothèse, difficile à étayer.
Les galeries n’auraient jamais servi, du moins pour du stockage : pas de traces d’entreposages, pas de mobilier archéologique, de débris. Pas d’ancrages au mur, aucun système de fixation pour l’éclairage, par de traces de suie aux murs. La citadelle a été démolie en 1585, aux frais des Lyonnais. Il n’en reste quasiment aucune trace, et pas un plan à Lyon. Le seul qui a été retrouvé pour l’instant se trouvait à Turin, peut-être ramené là au 16e siècle par un espion, histoire d’ajouter au romanesque de cette affaire.
Les découvertes effectuées dans le cadre d’une campagne d’archéologie préventive s’arrêtent là. Aucune prescription n’a été faite pour prolonger les recherches, les travaux de percement du tunnel ne touchant, selon Gilles Buna, adjoint à l’Urbanisme, que la partie inférieure des arêtes, "sur une distance de cinquante mètres", et à un endroit où les galeries ont déjà été partiellement bétonnées. L’élu a visité le réseau lundi matin, se promet de ne pas le refaire tant le parcours est sportif, assez accidenté pour interdire selon lui un accès à des visiteurs. Seule une petite partie pourrait un jour être aménagée, comme dans les catacombes parisiennes.
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