Effet Casimir dynamique : on a créé de la lumière à partir du vide
Une équipe internationale de chercheurs vient de prouver que l’effet Casimir dynamique est bien une réalité, en transformant des paires de photons virtuels du vide en véritables grains de lumière. Le physicien Paul Davies a montré que ce phénomène a des liens avec le rayonnement Hawking et l’effet Unruh.
Le physicien Paul Davies a connecté l'effet Casimir dynamique à la création de particules en espace-temps courbe. © Arizona State University-Tom Story
Les équations de la mécanique quantique prédisent que le vide ne l’est pas vraiment mais qu’il est continuellement agité par des paires de particules violant temporairement la loi de la conservation de l’énergie en se matérialisant brièvement avant de replonger dans le néant. Ces particules ne peuvent être observées directement mais leur présence est bien réelle comme l’ont montré, par exemple, les expériences avec l’effet Casimir.
Dans le cas de l’effet Casimir dit statique, on constate qu’entre deux miroirs séparés par une très courte distance, il apparaît une force d’attraction résultant de la modification de l’état des fluctuations quantiques du champ électromagnétique présent partout dans l’univers, même en l’absence de charges électriques. Ce ne sont cependant que des photons virtuels qui rendent compte de ce fascinant phénomène laissant rêver, un jour, d’une possible exploitation de l'énergie du vide quantique.
En 1970, le physicien Gerald Moore était toutefois arrivé à une autre surprenante conclusion.
Le mouvement accéléré d’un miroir, par exemple lorsqu’il effectue des oscillations à hautes fréquences, peut faire passer les photons virtuels directement inobservables du vide quantique à l’état de particules réelles. Concrètement, cela signifie qu’il suffirait de faire vibrer un miroir dans le vide pour éclairer une pièce.
Ce phénomène décrit pour la première fois par les équations de Moore sera appelé effet Casimir dynamique par Julian Schwinger, le prix Nobel de physique auteur de la première démonstration du théorème CPT.
Le principe de l'effet Casimir dynamique est, en simplifiant grossièrement, un peu similaire à celui d'une balançoire. En vibrant, la surface d'un miroir donne en quelque sorte des coups aux photons virtuels, violant la conservation de l'énergie temporairement donc normalement inobservables. Ces chocs donnent donc de l'énergie permettant aux photons de devenir réels, de la même façon que le mouvement d'oscillation d'une personne est amplifié lorsqu'elle se balance avec une balançoire. Des photons réels peuvent ainsi s'accumuler dans une cavité formée de parois réfléchissantes dont l'une vibre. © rob4jp-YouTube
L’effet Casimir serait resté anecdotique si l’effet Unruh et l’effet Hawking n’avaient pas été découverts, là aussi théoriquement seulement, au début des années 1970.
Dans le premier cas, un observateur en mouvement uniformément accéléré par rapport à un référentiel au repos devrait voir un bain de particules ayant les caractéristiques d’un rayonnement de corps noir, d’autant plus chaud que son accélération est forte, alors que pour un observateur au repos, il n’existe rien de tel. De même, en partie à cause du principe d’équivalence de la relativité générale, un observateur proche de l’horizon d’un trou noir et subissant l’accélération de la gravité devrait voir un rayonnement du même type. Dans les deux cas, il se produit une création de particules réelles à partir des paires de particules virtuelles du vide quantique.
Or, ces deux phénomènes ont été reliés à l’effet Casimir dynamique par le physicien Paul Davies, bien connu de nos jours pour ses ouvrages de vulgarisation et ses implications dans des recherches sur la biologie quantique et l’exobiologie. Il a ainsi cosigné l’article polémique faisant état de bactéries utilisant peut-être l’arsenic à la place du phosphore.
Un miroir qui vibre à 1/4 de la vitesse de la lumière
L’effet Hawking conduisant à l’évaporation des trous noirs n’a malheureusement pas été observé, pas même au LHC, mais il semblerait qu’on puisse en créer un analogue, par exemple dans une fibre optique. On comprend donc que la publication dans Nature et sur arxiv d’un article annonçant que l’on a bel et bien observé pour la première fois l’effet Casimir dynamique soit une bonne nouvelle car elle donne un peu plus de crédit aux calculs concernant les rayonnements Hawking et Unruh.
Mais pourquoi a-t-il fallu attendre presque quarante ans avant que l’on puisse observer cet effet Casimir dynamique ? Tout simplement parce qu’il faut que les mouvements du miroir s’effectuent à une fraction notable de la vitesse de la lumière ! Pour contourner cet obstacle, les physiciens ont fait appel à la supraconductivité.
Ils ont couplé un Squid avec une ligne constituant un guide d’onde microscopique. Le circuit supraconducteur se trouvant à une extrémité de cette ligne de transmission, il se trouve que modifier l’état du Squid, donc ce qu’on appelle les conditions aux limites pour une telle ligne, équivaut à avoir un miroir en mouvement à un quart de la vitesse de la lumière à cette extrémité.
Le signal micro-onde qui se forme à l’autre extrémité de la ligne en modifiant l’état du Squid plusieurs milliards de fois par seconde apparaît alors conforme à ce que l’on attendrait d’un vrai miroir vibrant dans le vide selon l’effet Casimir dynamique. Il semble donc que l’on ait bel et bien créé de la lumière à partir du vide…
Par Laurent Sacco, Futura-Sciences
SOURCE : futura-sciences.com
Une équipe internationale de chercheurs vient de prouver que l’effet Casimir dynamique est bien une réalité, en transformant des paires de photons virtuels du vide en véritables grains de lumière. Le physicien Paul Davies a montré que ce phénomène a des liens avec le rayonnement Hawking et l’effet Unruh.
Le physicien Paul Davies a connecté l'effet Casimir dynamique à la création de particules en espace-temps courbe. © Arizona State University-Tom Story
Les équations de la mécanique quantique prédisent que le vide ne l’est pas vraiment mais qu’il est continuellement agité par des paires de particules violant temporairement la loi de la conservation de l’énergie en se matérialisant brièvement avant de replonger dans le néant. Ces particules ne peuvent être observées directement mais leur présence est bien réelle comme l’ont montré, par exemple, les expériences avec l’effet Casimir.
Dans le cas de l’effet Casimir dit statique, on constate qu’entre deux miroirs séparés par une très courte distance, il apparaît une force d’attraction résultant de la modification de l’état des fluctuations quantiques du champ électromagnétique présent partout dans l’univers, même en l’absence de charges électriques. Ce ne sont cependant que des photons virtuels qui rendent compte de ce fascinant phénomène laissant rêver, un jour, d’une possible exploitation de l'énergie du vide quantique.
En 1970, le physicien Gerald Moore était toutefois arrivé à une autre surprenante conclusion.
Le mouvement accéléré d’un miroir, par exemple lorsqu’il effectue des oscillations à hautes fréquences, peut faire passer les photons virtuels directement inobservables du vide quantique à l’état de particules réelles. Concrètement, cela signifie qu’il suffirait de faire vibrer un miroir dans le vide pour éclairer une pièce.
Ce phénomène décrit pour la première fois par les équations de Moore sera appelé effet Casimir dynamique par Julian Schwinger, le prix Nobel de physique auteur de la première démonstration du théorème CPT.
Le principe de l'effet Casimir dynamique est, en simplifiant grossièrement, un peu similaire à celui d'une balançoire. En vibrant, la surface d'un miroir donne en quelque sorte des coups aux photons virtuels, violant la conservation de l'énergie temporairement donc normalement inobservables. Ces chocs donnent donc de l'énergie permettant aux photons de devenir réels, de la même façon que le mouvement d'oscillation d'une personne est amplifié lorsqu'elle se balance avec une balançoire. Des photons réels peuvent ainsi s'accumuler dans une cavité formée de parois réfléchissantes dont l'une vibre. © rob4jp-YouTube
L’effet Casimir serait resté anecdotique si l’effet Unruh et l’effet Hawking n’avaient pas été découverts, là aussi théoriquement seulement, au début des années 1970.
Dans le premier cas, un observateur en mouvement uniformément accéléré par rapport à un référentiel au repos devrait voir un bain de particules ayant les caractéristiques d’un rayonnement de corps noir, d’autant plus chaud que son accélération est forte, alors que pour un observateur au repos, il n’existe rien de tel. De même, en partie à cause du principe d’équivalence de la relativité générale, un observateur proche de l’horizon d’un trou noir et subissant l’accélération de la gravité devrait voir un rayonnement du même type. Dans les deux cas, il se produit une création de particules réelles à partir des paires de particules virtuelles du vide quantique.
Or, ces deux phénomènes ont été reliés à l’effet Casimir dynamique par le physicien Paul Davies, bien connu de nos jours pour ses ouvrages de vulgarisation et ses implications dans des recherches sur la biologie quantique et l’exobiologie. Il a ainsi cosigné l’article polémique faisant état de bactéries utilisant peut-être l’arsenic à la place du phosphore.
Un miroir qui vibre à 1/4 de la vitesse de la lumière
L’effet Hawking conduisant à l’évaporation des trous noirs n’a malheureusement pas été observé, pas même au LHC, mais il semblerait qu’on puisse en créer un analogue, par exemple dans une fibre optique. On comprend donc que la publication dans Nature et sur arxiv d’un article annonçant que l’on a bel et bien observé pour la première fois l’effet Casimir dynamique soit une bonne nouvelle car elle donne un peu plus de crédit aux calculs concernant les rayonnements Hawking et Unruh.
Mais pourquoi a-t-il fallu attendre presque quarante ans avant que l’on puisse observer cet effet Casimir dynamique ? Tout simplement parce qu’il faut que les mouvements du miroir s’effectuent à une fraction notable de la vitesse de la lumière ! Pour contourner cet obstacle, les physiciens ont fait appel à la supraconductivité.
Ils ont couplé un Squid avec une ligne constituant un guide d’onde microscopique. Le circuit supraconducteur se trouvant à une extrémité de cette ligne de transmission, il se trouve que modifier l’état du Squid, donc ce qu’on appelle les conditions aux limites pour une telle ligne, équivaut à avoir un miroir en mouvement à un quart de la vitesse de la lumière à cette extrémité.
Le signal micro-onde qui se forme à l’autre extrémité de la ligne en modifiant l’état du Squid plusieurs milliards de fois par seconde apparaît alors conforme à ce que l’on attendrait d’un vrai miroir vibrant dans le vide selon l’effet Casimir dynamique. Il semble donc que l’on ait bel et bien créé de la lumière à partir du vide…
Par Laurent Sacco, Futura-Sciences
SOURCE : futura-sciences.com
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