Le buvard qui pourrait éponger une marée noire
Cette feuille de nanofibres peut absorber vingt fois son poids en huile ou en hydrocarbure. Strictement hydrophobe, elle peut facilement extraire un polluant d'un milieu aqueux sans jamais s'imbiber d'eau, comme on le constate sur d'éloquentes vidéos... En plus, ce super buvard ne coûte pas cher et il est réutilisable.
La petite feuille brune plonge dans le récipient en verre et vient effleurer une flaque d'hydrocarbure coloré flottant à la surface. La tache est gobée en un instant, disparaissant si vite que l'œil ne voit pas le mouvement. Le niveau du liquide, lui, n'a pas bougé. Le buvard, en effet, n'aime pas l'eau et n'en retient pas une goutte.
La séquence vidéo (cliquez sur l'image à droite) montrant ce tour de magie n'est pas une publicité pour un détachant ni un truc de prestidigitateur. Ce buvard sans équivalent a été mis au point au MIT (Massachusetts Institute of Technology) par Francesco Stellacci, du Department of Materials Science and Engineering, Jing Kong (Department of Electrical Engineering and Computer Science) et quelques autres collègues.
A gauche, le flacon contient de l'eau sur laquelle flotte de l'essence, colorée en bleu. Après le passage du petit buvard, l'hydrocarbure a disparu. Il ne reste que l'eau... © Francesco Stellacci, MIT et Nature Nanotechnology
L'équipe vient de décrire son innovation dans la revue Nature Nanotechnology. Cette feuille est uniquement constituée de nanofibres d'oxyde de potassium et de manganèse, épaisses de quelques dizaines à quelques centaines de nanomètres mais très longues. Là réside le double secret de ce matériau. Ces filaments s'entortillent comme des spaghettis cuits et ne ménagent entre eux que des espaces d'environ dix nanomètres. Un corps gras, comme un hydrocarbure, ou un liquide quelconque pourvu qu'il soit hydrophobe pourra s'insinuer dans ce réseau et s'y répandre, jusqu'à constituer vingt fois le poids du buvard.
Bientôt une éponge géante contre les pollutions marines ?
Mais le constituant des nanofibres étant hydrophobe, les molécules d'eau ne pourront pas pénétrer dans les minuscules cavités et restent donc à l'extérieur. Quel est le niveau d'étanchéité ? Stellacci est catégorique : « Notre matériau peut être laissé dans l'eau un mois ou deux et, quand vous le sortez, il est sec ». Pour la démontrer, les chercheurs ont filmé le buvard en action dans une autre situation. De l'octane le traverse aussi facilement que le café passe le filtre d'une cafetière tandis que de l'eau reste y stagne comme sur un ciré.
Cette hydrophobie constitue la clé de la performance de ce curieux buvard. Pour l'absorption, d'autres matériaux font mieux. Certains, à base de polymères, s'imbibent jusqu'à capter 70 fois leurs poids. Mais dans le liquide aspiré, il y a beaucoup d'eau.
Ce matériau à nanofibres pourrait donc efficacement être utilisé pour dépolluer un milieu liquide, qu'il s'agisse d'une cuve ou d'une zone côtière envahie par la marée noire. L'équipe envisage sérieusement cette application à grande échelle. « Quelque 200.000 tonnes de pétrole sont déversées chaque année dans les océans » rappelle le communiqué de presse du MIT présentant ce matériau. Dans leur laboratoire, Stellacci et Kong n'ont réalisé que des feuilles de 27 centimètres de large mais on pourrait faire beaucoup plus grand. Les chercheurs expliquent que la fabrication est très simple et que le procédé est le même que celui utilisé pour la réalisation du papier. « Nous préparons une suspension de nanofibres, comme on le fait pour la cellulose, nous séchons sur un plateau et nous obtenons à peu près le même résultat » explique Stellacci.
Ce matériau est formé d'un enchevêtrement de longues fibres. Elles créent un inextricable réseau avec des pores d'environ 10 nanomètres laissant passer les molécules. Mais l'eau ne peut pas s'approcher suffisamment des parois hydrophobes des fibres pour pénétrer à l'intérieur de cet écheveau. © Francesco Stellacci, MIT, et Nature Nanotechnology
Une fois ce buvard gorgé d'huile ou de polluant, il peut être facilement lavé à la chaleur. Le matériau résiste en effet à une température de 600°C. Il suffit de le chauffer juste au-dessus du point d'ébullition du liquide absorbé et celui-ci s'évapore.
Pour transformer ce buvard de la taille d'une feuille A4 en un dispositif anti marée noire, il faudra encore un travail de mise au point. Mais il semble qu'aucun verrou technologique n'empêche d'aller plus loin dans cette direction...
Epaisse d'une cinquantaine de microns, cette fine feuille est une éponge à hydrocarbures. © Francesco Stellacci, MIT et Nature Nanotechnology
Cette feuille de nanofibres peut absorber vingt fois son poids en huile ou en hydrocarbure. Strictement hydrophobe, elle peut facilement extraire un polluant d'un milieu aqueux sans jamais s'imbiber d'eau, comme on le constate sur d'éloquentes vidéos... En plus, ce super buvard ne coûte pas cher et il est réutilisable.
La petite feuille brune plonge dans le récipient en verre et vient effleurer une flaque d'hydrocarbure coloré flottant à la surface. La tache est gobée en un instant, disparaissant si vite que l'œil ne voit pas le mouvement. Le niveau du liquide, lui, n'a pas bougé. Le buvard, en effet, n'aime pas l'eau et n'en retient pas une goutte.
La séquence vidéo (cliquez sur l'image à droite) montrant ce tour de magie n'est pas une publicité pour un détachant ni un truc de prestidigitateur. Ce buvard sans équivalent a été mis au point au MIT (Massachusetts Institute of Technology) par Francesco Stellacci, du Department of Materials Science and Engineering, Jing Kong (Department of Electrical Engineering and Computer Science) et quelques autres collègues.
A gauche, le flacon contient de l'eau sur laquelle flotte de l'essence, colorée en bleu. Après le passage du petit buvard, l'hydrocarbure a disparu. Il ne reste que l'eau... © Francesco Stellacci, MIT et Nature Nanotechnology
L'équipe vient de décrire son innovation dans la revue Nature Nanotechnology. Cette feuille est uniquement constituée de nanofibres d'oxyde de potassium et de manganèse, épaisses de quelques dizaines à quelques centaines de nanomètres mais très longues. Là réside le double secret de ce matériau. Ces filaments s'entortillent comme des spaghettis cuits et ne ménagent entre eux que des espaces d'environ dix nanomètres. Un corps gras, comme un hydrocarbure, ou un liquide quelconque pourvu qu'il soit hydrophobe pourra s'insinuer dans ce réseau et s'y répandre, jusqu'à constituer vingt fois le poids du buvard.
Bientôt une éponge géante contre les pollutions marines ?
Mais le constituant des nanofibres étant hydrophobe, les molécules d'eau ne pourront pas pénétrer dans les minuscules cavités et restent donc à l'extérieur. Quel est le niveau d'étanchéité ? Stellacci est catégorique : « Notre matériau peut être laissé dans l'eau un mois ou deux et, quand vous le sortez, il est sec ». Pour la démontrer, les chercheurs ont filmé le buvard en action dans une autre situation. De l'octane le traverse aussi facilement que le café passe le filtre d'une cafetière tandis que de l'eau reste y stagne comme sur un ciré.
Cette hydrophobie constitue la clé de la performance de ce curieux buvard. Pour l'absorption, d'autres matériaux font mieux. Certains, à base de polymères, s'imbibent jusqu'à capter 70 fois leurs poids. Mais dans le liquide aspiré, il y a beaucoup d'eau.
Ce matériau à nanofibres pourrait donc efficacement être utilisé pour dépolluer un milieu liquide, qu'il s'agisse d'une cuve ou d'une zone côtière envahie par la marée noire. L'équipe envisage sérieusement cette application à grande échelle. « Quelque 200.000 tonnes de pétrole sont déversées chaque année dans les océans » rappelle le communiqué de presse du MIT présentant ce matériau. Dans leur laboratoire, Stellacci et Kong n'ont réalisé que des feuilles de 27 centimètres de large mais on pourrait faire beaucoup plus grand. Les chercheurs expliquent que la fabrication est très simple et que le procédé est le même que celui utilisé pour la réalisation du papier. « Nous préparons une suspension de nanofibres, comme on le fait pour la cellulose, nous séchons sur un plateau et nous obtenons à peu près le même résultat » explique Stellacci.
Ce matériau est formé d'un enchevêtrement de longues fibres. Elles créent un inextricable réseau avec des pores d'environ 10 nanomètres laissant passer les molécules. Mais l'eau ne peut pas s'approcher suffisamment des parois hydrophobes des fibres pour pénétrer à l'intérieur de cet écheveau. © Francesco Stellacci, MIT, et Nature Nanotechnology
Une fois ce buvard gorgé d'huile ou de polluant, il peut être facilement lavé à la chaleur. Le matériau résiste en effet à une température de 600°C. Il suffit de le chauffer juste au-dessus du point d'ébullition du liquide absorbé et celui-ci s'évapore.
Pour transformer ce buvard de la taille d'une feuille A4 en un dispositif anti marée noire, il faudra encore un travail de mise au point. Mais il semble qu'aucun verrou technologique n'empêche d'aller plus loin dans cette direction...
Epaisse d'une cinquantaine de microns, cette fine feuille est une éponge à hydrocarbures. © Francesco Stellacci, MIT et Nature Nanotechnology
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